Consulter la vidéo du poèmes sur http://bgueit.overblog.com/peuples-de-la-mer
Ce blog est la continuation du blog Editions A l'écoute, arrivé à saturation vu qu'au delà de son remplissage actuel le site Blog4ever demande de payer. Donc j'archiverai sur arevareva.eklablog.com toutes sortes de textes que j'ai aimé lire , pour les relire, et je les effacerai sur simple demande de l'auteur. Pour consulter les anciennes Editions à l'écoute , hors commerce, cliquer sur ces mots juste au dessous du titre du blog, ou copier coller dans la barre de recherche http://oriata.blog4ever.com/blog/index-515069.html et pour ART CATALYTIQUE, copier coller : http://tronoriatadominique.over-blog.com/
Bernard Gueit :
Nous descendons des Dieux.
Peut-être ce souvenir de puissance
Cet orgueil, cet inconnu aussi en nous
qui nous pousse en avant
Nous cherchons à comprendre ce petit bout d'étoile fêlé au coin du front
Nous sommes les peuples de la mer
habitués à nous battre avec l'écume
la parole des vents
à aimer les très grands poissons
Nous portons le souvenir de l'eau au front
un très vieil hippocampe,
une pieuvre au regard vert
Nous nous sommes apprivoisés tout seul
Qui nous l'aurait appris ?
dans la douceur des vagues
ce très ancien remue-ménage au fond des eaux
Nous en faisons une maison de voyage
et nous voguons toujours vers l'Ouest
comme pour fuir notre naissance
ou faire le tour de nous-mêmes, de bout en bout,
Voguons !
Nous commençons seulement
à parler
par nous mêmes
et pour nous-mêmes
Nous nous faisons peur
avec ces mots pas encore à nous
ces bruits du coeur
ces images remplies de sang
Un jour
nous passerons sous la lumière
et nous vaincrons
les taureaux d'ombre
Un jour les étoiles
se rapprocheront de nous
à nous toucher
dans leurs bras bleus scintillants
Nous commençons seulement
à compter les jours
qui nous séparent du début
et nous rapprochent de la fin
Alphabet nous avons écrit
sur les murs
des chants sacrés des paroles funèbres
Nous avons porté nos morts
à bout de bras jusqu'à l'éternité
l'éternité du désert
où le temps ne passe plus
qu'à dos de chameau parfois
Où le vent charrie nos souvenirs si anciens
qu'ils retombent en poussière
Survivent les images
dans nos livres de pierre
de reines si belles et si mystérieuses
retournées à leur paradis en secret
On les croise parfois encore en rêve
quand elles rêvent de leur terre de sable
Alphabet tu montes au ciel
et en redescends aussitôt les mains vides
Alphabet le début du monde
balbutié par un enfant
abandonné sur le Nil
Le fleuve cette fracture qui s'écoule
Le fleuve et sa présence humaine du fond des âges
Le fleuve et son âme dorée dans les remous
Le fleuve et ses bonds dans les roseaux
Le fleuve au ressac intérieur
à la houle souterraine
Le fleuve qui parle comme un homme en crue
Le fleuve et son discours impétueux
sa parole généreuse
Le fleuve noyé dans ses pensées
Le fleuve et ses débordements de larmes
ses émotions incontrôlées
ses éclats de voix ses écailles de lumière
Le fleuve à la gaieté jaillissante parfois
sa cour d'oiseaux
ses poissons sages pêchés sous l'arc-en-ciel
Le fleuve dans l'éternelle jeunesse du fleuve
l'eau de l'instant vers l'océan éternel
Les rivières meurent parfois dans la gorge
jamais les fleuves
aiguisés par le puissant aimant de la mer
Les fleuves aux joues d'algues vertes
creusées sous les yeux des berges
Les fleuves et leur lit d'impatience sous la lune
Désormais Dieu est parmi nous
un morceau de notre coeur
une étoile de mer échouée dans nos corps translucides
et sa parole est de corail
Désormais il faudra justifier toutes les guerres
et la durée du travail
Petite fourmi en exil
tu comptes les grains de sable
tu voudrais déplacer les montagnes
ne compte que sur ta voix
Derrière la cigale et son souffle
petite fourmi qui s'essouffle
ton drapeau est celui des sans voix
Quels cris derrière la montagne ?
Où sont les combats, les coqs, les armées ?
Dans quel lit s'établissent les présages ?
L'histoire est à vos pieds
comme un loup docile
Elle mord dans le futur de vos doigts
et dévore vos projets
Un loup immense couché dans son ombre
qui prédit l'avenir
en hurlant à la lune
Le ciel est à ce point saturé d'images, celle du loup historique couché dans son ombre, celle des étoiles en fuite à la pointe du jour, celle des entrailles, celle des femmes tziganes, celle des guitares en feu près des roulottes, celle des pleurs crépitant dans la braise, celle des miroirs, celle des chevaux fumants noirs sous la pluie, celle des musiques qui tanguent doucement, celle des chants murmurés bas en rythme, psalmodiés dans le vent, accompagnés des vagues, O Marins, O Sirènes, O Nous tous égarés.
Les éphémères se serrent l'un contre l'autre. Même le vent hésite à briser cette image. La poésie a des images réelles, des rochers posés devant la mer, depuis des siècles.
Des siècles qui apprennent la patience et les langues étrangères de marins perdus dans les tempêtes. Les éphémères se serrent l'un contre l'autre, leur peau exulte une histoire tragique, Frères et soeurs punis des Dieux, sous le soleil de la vie.
Les éphémères se serrent l'un contre l'autre, même le temps ne peut rien contre cette image, cette force intime, cette tendre résolution, cette clarté des évidences...
Les éphémères se tiennent par la main pour des milliers d'années. Partis d'eux mêmes, du fond du coeur, ils s'arrachent aux temps immémoriaux, à la colline, aux rochers, à la mer, au souvenir de leur naissance, à leur superstition.
Ils prennent connaissance et conscience d'eux-mêmes
Ils se mettent à rêver debout
à parler aux arbres
à peindre pour leurs descendants
De la peur ils ne retiennent que la course en avant
De la tempête ils écrivent la voile
De la condamnation, ils expriment le sursaut
De la nuit, ils ne reconnaissent que l'amour...