Quelques poèmes de Joubert Joseph, poète haïtien du 21ème siècle et membre du groupe artistique international ''Horde catalytique pour la fin de l'anthropophagie''.
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© Joubert Joseph
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MÉMOIRE D'UNE GUÉRISON
Je me souviens de cette chambre
Que nous avons remplie
De nos sueurs
Et de silences palpables
Nous avons fait transpirer les mots
Au creux d'un désir fauve
Je me souviens de cette chambre
Oú nous avons tant pleuré
Au rythme de l'amour
Je ne puis remplir les vides
Que ton absence crée
Dans mes veines
Avec le doute
Et le chagrin
Je t'aime
Comme un éclair perdu
Aux tréfonds du ciel
Tu m'as fait toucher
Des choses interdites
Et tu m'as montré
Sur ton corps
Le secret du paradis
Comment vivre
Avec les cicatrices
D'une femme qu'on aime?
Ne pars pas mon amour
J'ai tant d'histoires
À écrire
Avec ma langue
Sur le bout de tes seins.
15 Juin 2015
Joubert Joseph
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LE MAL DE LA TERRE
ou LA SOUFFRANCE D'UNE ILE
Ce jour là, le vent creusait l'horizon avec ses griffes dans la nudité de la nature
La respiration de la mer flouait les vagues affolées sous le ciel noir
c'était le soleil qui peignait ses reves dans l'innocence des étoiles
la grève avait déjà bu nos larmes
et le sable laissait sur nos visages les entrelacs ocrés du désespoir
un arbre déambulait en silence avec le secret de l'éternité caché sous sa chevelure
Ô mon ile bleue que sont devenues tes forets remplies d'oiseaux et de bougainvilliers
la terre gémit sous l'enclume , mais l'homme est sourd et ses cris ne sont que poussière,
elle craque sous le galop des chasses légendaires
un jour viendra où les nuages denses danseront avec la lune entrelacés pour exorciser nos maux
et nous nous servirons de nos mots pour fuir cet univers
tels des chiens errants laissant derrière nous la terre offensée,
outragée depuis la nuit des temps.
Joubert Joseph et Denise Bernhardt le 18 Mai 2015
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GREVE
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Un matin
après avoir rompu
avec mon sommeil
je prends part
à tremper mes pieds
dans la tristesse du jour
je vois les rues remplies de maux
mots sauvages
la rivière chante
une chanson en putréfaction
néanmoins le soleil marche
sur les pneus enflammés
sur les barricades
aux figures de protestation
les tessons de bouteilles dansent
dans la densité des rues
et j'entends une voix lointaine disant
ce pays est un devoir à rediger
midi moins cinq
la nuit envahit le jour
strip-tease de nuages
au bord de la mer
naissance de nouveaux astres
dans la précocité de la nuit
tete calée mon ame s'évade
je me souviens des lampadaires
qui n'ont aucun respect
pour l'obscurité
disparition de l'horizon
la grève est lancée.
Joubert Joseph
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INTIME
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Chaque matin
Je me lave les yeux/
Avec des vers
Qui coulent
Comme une chanson
à double sexe
Je ne lis plus
En plein jour
Pour coiffer mon âme
Je lis dans des moments/
Qui n’ont pas de nom/
Pour coffrer le stress
Dans mon cœur
J’oublie mon ombre/
Sous le jupon d’une nuit
En plein midi/
Métissage de rêves
Dans les fentes de mes doigts
Chaque soir
Je serre la main
De la lune
Je baise les étoiles
Sans maux
Je coince les nuages
Avec mes mots
Au cœur de ma poésie errante.
Joubert Joseph
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BONNE FETE À DENISE BERNHARDT
O poète
Je t'apporte
une multitude d'îles-mots
Au creux de mes mains
Métaphores infinies
Luisant sur ton visage
Et dans la danse de tes prunelles
Mon silence n'est qu'espace
Espace pour noyer l'invisible
Dans la lueur de tes maux
À ta guise O poète
Je t'apporte mille sourires verrouillés
Pour exorciser ma peur
Peur de te dire
BONNE FETE.
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